1. Pourriez-vous nous parler de votre parcours ?
J’ai commencé par des études de droit privé avec l’idée de devenir avocat pénaliste, comme beaucoup. Lors d’un stage en cabinet d’avocats, je me suis rendu compte que je n’étais prêt pour cette carrière et les choix éthiques qu’elle implique. La suite de mon parcours relève en partie du hasard. J’ai intégré un master 1 en droit public avec des dominantes de droits européen et international à Reims, animé par mon intérêt pour la vie publique et ma conviction que maitriser le droit européen était essentiel. C’est là que j’ai découvert les sujets liés aux droits du numérique et à la propriété intellectuelle, qui ont été un véritable déclencheur pour moi.
Je me suis alors orienté vers un master 2 en droit du multimédia et des systèmes d’information, à Strasbourg. Mon stage de fin d’études a été un moment clé. Nous étions en février 2018, et le Règlement général sur la protection des données (RGPD) allait entrer en vigueur en mai de la même année : un timing parfait, qui s’est traduit par une grande offre de stages. J’ai trouvé un stage dans un grand groupe industriel français, LISI, où tout était à construire en matière de protection des données. Cette expérience a confirmé mon orientation.
Je suis entré dans la vie active avec la conviction que la protection des données est avant tout une protection des individus. C’est dans le service public que j’ai senti que mon action aurait le plus de sens, au vu de la masse, de la qualité et de la représentativité des données traitées. J’ai ainsi postulé au GIP Union Retraite, où j’ai passé cinq ans et demi. Dans cette structure semi-publique à taille humaine, j’ai évolué de chargé de mission à délégué à la protection des données (DPO), puis DPO mutualisé pour plusieurs membres du groupement. En mars 2024, j’ai rejoint le Rectorat de Paris en tant que DPO.
2. Qu'est-ce qu'une donnée personnelle ?
C’est toute information permettant d’identifier une personne, directement – une image, un numéro de sécurité sociale – ou indirectement – une information anodine peut aussi devenir sensible par recoupements... C’est donc un champ très large ! D’ailleurs, le terme « protection des données » utilisé pour désigner cette matière est mal choisi : ce dont il est question, c’est avant tout la protection des personnes.
3. Quelles sont vos missions au quotidien ?
Il s’agit pour moi de créer la structure, l’organisation et les procédures nécessaires pour que l’académie de Paris protège efficacement les données personnelles des élèves, des parents et des agents.
Mon travail repose sur trois axes principaux. D’abord, conseiller la direction sur des aspects juridiques mais aussi techniques. Ensuite, servir de point de contact à la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (CNIL). Enfin, être l’interlocuteur des personnes concernées par les traitements de données mis en œuvre par les services académiques et les établissements scolaires.
Dans la pratique, je traite des questions à la fois juridiques et techniques. Il faut vérifier si un traitement de données est conforme au RGPD, comprendre comment les systèmes d’information fonctionnent et déterminer, avec le responsable de la sécurité des systèmes d’information (RSSI) et la Direction des Systèmes d’information (DRASI), les mesures de protection les plus adaptées. C’est un poste très transversal qui donne accès à tous les services et aux informations les plus sensibles.
4. Quelle réussite mettriez-vous en avant ?
Pour démarrer une politique de protection des données efficace, il faut un portage fort au sein de l’institution – et j’ai la chance de bénéficier du soutien de ma hiérarchie. Mais au-delà de cela, il faut être capable de faire accepter cette démarche par tous : enseignants, personnels administratifs, services académiques... Il s’agit de créer une dynamique positive.
Ma plus grande satisfaction, c’est de parvenir à incarner le rôle de garant des droits et des libertés dans un environnement très complexe. Et surtout, quand je parviens à susciter une prise de conscience sur ce sujet auprès de personnes qui n’étaient pas, à l’origine, sensibilisées à ces enjeux.
5. Que diriez-vous à quelqu'un qui envisage de rejoindre l’Éducation nationale ?
Si l’on cherche du sens dans son travail, c’est un choix très pertinent. On a un rôle important et un impact direct sur les individus. Mais il faut être prêt à relever des défis de taille : faire au mieux avec peu de moyens, moderniser des pratiques parfois très ancrées sans brusquer les choses, et accepter de travailler sur un temps long. Cela demande de la patience et beaucoup d’énergie. Mais quand les choses avancent, c’est une immense satisfaction !
Mise à jour : mars 2025