La poursuite de l'agitation dans les facultés en 1969

Les exactions du 23 janvier dans le palais académique de la Sorbonne

Janvier 2019

Si la loi Faure et la création à Paris des centres universitaires de Dauphine et Vincennes à la fin de l’année 1968 ont contribué à répondre en partie à l’inadaptation de l’enseignement supérieur aux réalités socio-économiques du pays, ainsi qu’à l’afflux massif d’étudiants à la rentrée de 1969, ces mesures n’ont pas pour autant apaisé l’agitation dans les facultés. De nombreuses exactions ont en effet été commises dès le début de l’année 1969, visant en particulier les symboles de l’autorité académique et facultaire.

Le 23 janvier, les bureaux du recteur Jean Roche et du secrétaire général Pierre Bartoli sont vandalisés. Ces événements nous sont connus aujourd’hui notamment au travers de photographies prises à la suite des dégradations. Elles sont rassemblées au sein d’un album conservé et consultable sur le site de Pierrefitte-sur-Seine des Archives nationales (cote 20000387/23). Nous vous proposons d’en découvrir trois exemples marquants.

Des individus se sont en effet introduits dans les bureaux des instances académiques en leur absence et les ont dégradés. Des œuvres, comme le portrait du cardinal de Richelieu peint par Philippe de Champaigne (voir ci-dessous), symbole fort car figure d’autorité de la monarchie absolue de droit divin, ont été recouvertes de graffitis. Les militants se sont exprimés ainsi par la bouche du cardinal afin notamment de faire passer le message suivant : « L'humanité ne sera heureuse que quand le dernier cardinal aura été pendu avec les tripes du dernier homme d'État ». Il s’agit ici d’une référence à la lettre de Voltaire adressée à Claude-Adrien Helvétius en date du 11 mai 1761, «Est-ce que la proposition honnête et modeste d’étrangler le dernier jésuite avec les boyaux du dernier janséniste ne pourrait amener les choses à quelque conciliation ?» elle-même inspirée par les écrits de Jean Meslier repris aussi par Voltaire « L'humanité ne sera heureuse que le jour où le dernier des tyrans aura été pendu avec les tripes du dernier prêtre ».

Par ailleurs, des documents et du mobilier ont été renversés ou parfois détruits (voir  ci-dessous).

Les revendications et positions des militants sont clairement visibles sur les murs : « CAL VAINCRA » (CAL : Comité d’action lycéen) ou « CRS=SS ».

En outre, une plaque de marbre commémorant les personnels de l’académie de Paris morts pour la France lors des deux guerres mondiales du XXe siècle a été dévoyée afin de rendre hommage à Gilles Tautin mort en martyr (voir ci-dessous). Ce lycéen de l’établissement Stéphane Mallarmé avait 17 ans lorsqu’il trouva la mort le 10 juin 1968 près de l’usine Renault de Flins en grève, alors qu’il était venu participer au meeting organisé par la CGT et la CFDT. Militant maoïste de l'Union des jeunesses communistes marxistes-léninistes (UJCML), il est mort noyé suite à une charge des forces de l’ordre.

 

Mise à jour : novembre 2023