La Lecture constitue pour beaucoup d’élèves un point d’achoppement. Imposée, elle peut être considérée par les élèves comme rébarbative. Pour un grand nombre d'élèves, lire une œuvre en entier pose de grandes difficultés. Cette incapacité entraîne souvent une grande démotivation. Et si voir lire d'autres élèves constituait une incitation à relever le défi de la lecture intégrale ? C’est en partant de cette hypothèse que quatre enseignants ont imaginé ce projet pluridisciplinaire et interdegré. La lecture à voix haute est une compétence essentielle. La question de l'expression orale est aujourd'hui primordiale à la fois dans la validation des acquis du second cycle et notamment dans le référentiel du baccalauréat, mais aussi dans le parcours postbac. Rendre les élèves sensibles à l'unité d'une œuvre, à son intégrité est aujourd'hui un fondement de la pratique de l'enseignement du français. Cela permet une connaissance et une compréhension plus profondes, plus sûres, plus expertes.

Pour mener à bien ce projet, les enseignants ont utilisé leur liberté pédagogique et les nouveaux moyens technologiques pour qu'une lecture à voix haute puisse être reprise à distance et dans des modalités différentes en fonction des objectifs. Dans cette perspective, plusieurs enseignants se sont lancés dans un projet pluridisciplinaire en partenariat avec le Conservatoire du 9ème arrondissement et la comédie française, dans le cadre d’une convention quadripartite.

• Benoît Couteleau professeur de lettres et de théâtre Lycée Lamartine
• Céline Romatif professeur de lettres modernes au lycée Paul Poiret
• Julie Boillot-Savarin professeur d’art appliqué au lycée Paul Poiret
• Jérôme Combes professeur de sciences
• Elsa Saladin professeur de théâtre au CMA9 (Conservatoire du 9ème arrondissement)
• Marine Jubin responsable du service éducatif

Les élèves lisent pour les élèves

Dans ce projet inter-degrés, le travail de lecture des élèves de première S2TMD (Spécialité théâtre) du Lycée Lamartine et celui de technicien lumière et son des étudiants en DNMADE du Lycée d'Art, de la Mode et du spectacle du Lycée Paul Poiret sont mis en valeur afin de redonner à la lecture ses lettres de noblesse.

Un groupe classe travaille en cohésion la lecture d’un texte et collabore avec des élèves post bac sur la captation de cet exercice destiné à être vu par des élèves du secondaire dans le cadre de leur programme de français. Cette année c’est la pièce de Jean-Luc lagarce « Juste la fin du monde »  qui sert de support à ce travail.

Mise en œuvre depuis décembre 2021

Des rencontres inter-degrés, ainsi que des rencontres avec des professionnels des métiers du spectacle ont permis à chacun de s'interroger sur la pratique de la lecture à voix haute pour le numérique. Les rencontres se sont organisées dans des lieux différents qui ont engagé les élèves et les étudiants dans des démarches pro actives.

Le travail sur le texte est croisé avec le visionnage de la captation de la mise en scène de François Berreur avec Hervé Pierre, le film de Xavier Dolan avec Gaspard Ulliel. Ce travail est complété par de des réflexions plus théoriques autour de la langue de Lagarce, cette parole si elliptique, qui sollicite le comédien aussi bien dans son souffle que dans l'adresse. Le dispositif est très minimaliste, deux praticables pour chaque partie, avec un changement de disposition lors de l'intermède. Sur la table, quelques éléments, une carafe d'eau, des verres, quelques bougies, ... un bouquet de fleurs séchées, une nappe. Avant le tournage final, plusieurs lectures intégrales sont réalisées avec une double distribution.

Quels effets ?

Faire collaborer des élèves du secondaire et de l'enseignement supérieur permet de remplir un double objectif. D'un côté, il incite les élèves du secondaire à se projeter dans leur parcours post-bac. De l'autre, il permet à des étudiants de mettre en pratique et de partager leur savoir. La convention quadripartite établie pour ce projet conduit aussi de travailler avec une structure artistique reconnue qui a expérimenté des dispositifs de partage des savoirs à distance et a réfléchi à une forme hybride et novatrice de représentation théâtrale. Enfin, le Conservatoire, partenaire permanent de la S2TMD est le quatrième pilier sur lequel repose la pratique des élèves de théâtre.

L’intensité du projet a été soulignée par l’ensemble des acteurs car il s’est inscrit dans un temps très court et avec des nouveaux partenaires sur des niveaux différents et complémentaires pour le projet. Il permet aux élèves de persévérer dans la durée du projet et trouver sa place. Les élèves portent un regard différent sur la lecture intégrale lorsqu’elle est proposée comme un projet collectif. La captation vidéo quant à elle a permis de capter l’attention, de donner une autre présence aux élèves et surtout de donner un temps supplémentaire à un acte éphémère. En travaillant la lecture filmée les compétences fondamentales et les usages du numérique éducatif sont ainsi confortées et l’enseignement peut se dérouler à distance.

L’équipe compte bien s’inscrire dans un temps long pour constituer une vidéothèque mais aussi proposer une lecture audio uniquement pour simplifier le processus qui peut prendre beaucoup de temps au montage ou réaliser uniquement un plan séquence. Ce projet sera aussi l’occasion d’un échange à distance avec une autre classe de S2TMD à Tahiti.